L’urbanisme transitoire : une installation éphémère pour penser la ville durablement

13 mai 2020Rêves et Débats

Federal st Polka dots – (c) Bike Auckland

L’urbanisme transitoire, l’urbanisme tactique… autant de notions qui se sont révélées avec la crise du Coronavirus. Les villes françaises dessinent des pistes cyclables (pour l’instant) temporaires, afin de favoriser la pratique du vélo. Dans un tel contexte de distanciation sociale et d’incertitudes, ce moyen de transport et cette démarche exploratoire d’urbanisme apparaissent comme décisifs. Mais qu’est ce que l’urbanisme transitoire? Retour sur un interview de décembre 2019  de Ségolène Charles de l’Atelier du Lieu à Nantes (agence d’architecture et d’urbanisme spécialisée en participation citoyenne) pour le magazine La Semaine, 

Qu’est-ce que l’urbanisme transitoire ?

« L’urbanisme transitoire s’inscrit dans des enjeux d’innovation, d’invention des nouveaux modes de vie et d’habiter, à la transition écologique. A travers des terrains et des bâtiments inoccupés, il s’agit de réactiver la vie locale de façon provisoire, lorsque l’usage du site n’est pas déterminé, que le projet urbain tarde à se réaliser ou que les futurs usages imaginés nécessitent d’être testés. La transition écologique suppose de faire avec l’existant et de s’adapter à un monde en pleine évolution. »

C’est le principe du rien ne se crée, tout se transforme…

« Un de projets emblématique – les Grands Voisins à Paris – illustre l’institutionnalisation de cette pratique. A l’origine, un ancien hôpital (tiens, de quoi éveiller l’intérêt des Nancéiens), celui de Saint-Vincent-de-Paul fermé en 2012. Des milliers de mètres carrées à surveiller : Paris Batignolles aménagement et la Ville de Paris confient les clés du site à l’association Aurore Héberge qui soigne et accompagne des personnes en situation de précarité ou d’exclusion vers une insertion sociale et professionnelle. Progressivement se crée un lieu de cohabitation entre personnes hébergées, riverains, travailleurs installés sur le site, en s’appuyant sur les matériaux récupérés sur des chantiers de démolition du territoire, en partenariat avec des structures de réemploi.

Après deux “saisons” fructueuses de collaboration et d’imagination, il s’agit à présent d’initier les travaux de démolition et de réhabilitation des bâtiments : comment garder l’esprit et la dynamique d’un lieu (ressourcerie trocshop, coopérative de bien être…) et qui ont généré des emplois ? Ces occupations temporaires permettent non seulement d’éviter les phénomènes de squats, d’empêcher la dégradation d’un lieu et d’économiser les frais ce gardiennage, mais surtout de réfléchir à l’avenir d’un lieu : tester des activités et identifier des porteurs de projet. Darwin à Bordeaux, Les Grands Voisins à Paris, l’écoquartier Danube à Strasbourg, autant de projets métropolitains emblématiques. Quels que soient la taille du site, le budget et les moyens humains alloués, l’urbanisme transitoire offre une opportunité de construire la ville avec les ressources existantes. »

La piétonnisation ?

« A Héric, commune de la métropole de Nantes de moins de 6 000 habitants, ces derniers ont été invités à tester le temps d’un été des préfigurations d’un projet imaginé pour le futur du centre-bourg, la piétonnisation d’une rue pour permettre un accès plus serein aux équipements du centre-ville.

L’Atelier du Lieu a accompagné la collectivité dans cette démarche. Par un travail interactif mené avec un panel d’élus et d’habitants, chaque élément du futur plan de centre-bourg a été discuté,  argumenté et présenté aux habitants, lesquels on été invités à tester et à réagir aux expérimentations mises en œuvre pendant deux mois. La piétonnisation a été ajustée selon les usages tout en s’intégrant dans le cadre technique et urbain du plan dessiné. Une installation éphémère, pour penser la ville durablement ».

Exemple de projet urbain abordant la question de l’urbanisme transitoire

Aménagement Centre-ville de Héric